
Nous venons de voir comment, à l'aide d'une mobilisation générale de la part des ingénieurs et de la communauté scientifique, l'Homme a pu améliorer ses performances sportives à l'aide de l'étude approfondie des denticules. Cependant comme vous vous en doutez surement nous avons uniquement effleuré, tout au long de notre rapport, la surface de ce qu'est la biomimétique et tout ce qu'elle a permis de réaliser et d'inventer d'un point de vue technique, physique ou mécanique. C'est pourquoi nous vous proposons de passer en revue quelques uns des plus grands accomplissements de cette ingénierie nouvelle à travers cette ouverture.
Dans un premier temps, afin de rester un minimum attaché à notre sujet, nous pouvons préciser que les denticules du requin, conférant à la peau de ce dernier une certaine rugosité et une dureté relativement importante, font guise de véritable couverture et de protection anti-bactérienne. En effet la surface émaillée de la silhouette de ce prédateur empêche toute prolifération de micro-organismes car cet émail est trop dur pour être colonisé. C'est ce qu'affirme du moins le chercheur de l'université de Floride «Anthony Brennan» qui cherche des moyens de reproduire cette surface denticulée au sol des hôpitaux ou à l'utiliser à des fins médicales en général.
Toutefois, les inventions que l'on doit à la nature et à l'étude de celle-ci ne se résument pas à l'utilisation humaine des propriétés des denticules (bien qu'elle soit certainement l'application biomimétique la plus marquante et la plus impressionnante) mais comprend de très nombreux aspects de notre société dont on ne se doutait même pas tant ils y sont omniprésents et quotidiens. Et l'on peut retrouver certaines ces créations humaines inspirées par notre environnement plus proche de nous et plus usuellement présentes dans notre vie de tout les jours que vous pourriez le penser. Ainsi baissez la tête et observez vos chaussures vous y retrouverez peut-être ce que l'on appelle «scratch». Rien de bien impressionnant aux premiers abords, pourtant cette invention de l'ingénieur Suisse «George de Mestral» est l'essence même de ce qu'est une application pratique du biomimétisme et est un vrai symbole de l'esprit de reproduction simple néanmoins pratique via l'inspiration de l'écosystème de ce même domaine. Ainsi c'est lors d'une balade avec son chien qu'il observera qu'une multitude de fleurs de bardane (photo ci-dessous) s'est accroché à son pelage (en effet ces fleurs étant pourvues de nombreux petits crochets à leur surface s'agrippent au poil des animaux ou à tout autre textile humain). Cette constatation donnera un éclair de génie à l'ingénieur qui n'aura qu'à reproduire cette caractéristique de la fleur à moindre échelle avec une bande de coton doux et une bande (en polyester) dotée de minuscules crochets. Les crochets s'agrippent aux points d'ancrage que représente le coton. Cette invention nommée «velcro» tient d'ailleurs son nom du mot valise tiré de la contraction entre «velours» et «crochet».
Levez ensuite les yeux, vous êtes à Paris et à 300m d'altitude s'élève la majestueuse tour Eiffel, ce monument est si connu qu'il ne semble plus avoir de secret pour personne et pourtant saviez vous que la dame de fer tire sa structure de celle de notre fémur. Ce dernier étant le plus solide du squelette humain il a permis d'inspirer de nombreux architectes afin de concevoir des fondations ultra-solides et durables. L'exemple de ces prouesses de construction montre de plus qu'il ne suffit pas de chercher bien loin afin de trouver une spécificité de la nature pouvant bénéficier à l'Homme (l'étude de l'anatomie humaine permet d'ores et déjà de grandes avancées techniques).
Tournons nous encore une fois vers des évolutions architecturales dûes au biomimétisme et portons ainsi notre regard vers les éoliennes. Là aussi ces constructions massives ne semblent pas présenter de spécificités, tirées du monde animal, particulières; concentrez vous alors sur les pales de ces éoliennes. Nous vous étonnerions peut-être si l'on vous révélait que ces méga-structures sont actuellement inspirées des baleines et plus particulièrement des nageoires des baleines à bosses. C'est ce qu'a réalisé l'entreprise Whale Power grâce aux recherches du biologiste Franck Fish qui ont abouti à la découverte de l'impressionnant hydrodynamisme de ces baleines et de leur capacité à effectuer des virages serrés malgré leur taille et leur poids. En émettant l'hypothèse que ces qualités étaient dûes aux nageoires de ces géants cétacés et plus précisément aux tubercules recouvrant la face antérieure de ces dernières, il finira par prouver que les spécificités des nageoires caudales des baleines à bosses permettent une réduction de la traînée de 32% par rapport aux nageoires normales, dépourvues de tubercules (ces tubercules redirigent les flux afin de lui redonner un écoulement le plus laminaire possible tout comme les canaux des denticules). Par conséquence, une fois ces tubercules reproduites minutieusement et appliquées aux éoliennes cette nouvelle structure des pales augmente leur rendement énergétique d'environ 20% de plus. Les éoliennes pourvues de cette technologie sont bien moins bruyantes que leurs comparses non inspirées des baleines. Elles sont aussi plus stables lors d'éventuelles tempêtes.
Continuons sur notre lancée d'exemples d'inventions et d'améliorations biomimétiques dont l'inspiration est, pour le moins, inattendue. Elevons nous encore plus haut dans les airs et penchons nous sur les combinaisons des pilotes de chasse ou des astronautes. Les ingénieurs militaires et les chercheurs en aérospatial sont en effet allés chercher sur la terre ferme la solution au problème du «voile noir» qui est un manque d'oxygène acheminé au cerveau résultant en la perte de connaissance du pilote ou de l'astronaute. C'est en étudiant la girafe et son aptitude à ne pas ressentir cet effet mortel malgré la taille de son cou (qui, à cause de la gravité, devrait empêcher, au moins partiellement, le sang de parvenir au cerveau du mammifère) que la combinaison anti-G actuelle a été conçue. Cette dernière est ainsi pourvue d'un système de clapet antiretour sanguin semblable à celui de la girafe. Aujourd'hui les combinaisons se sont grandement améliorées et pressurisent les parties basses du corps à l'aide d'air comprimé ou d'un liquide spécial.
On ne peut oublier de citer l'intérêt absolue que portaient les ingénieurs en biomimétique aux propriétés entièrement et naturellement hydrophobes des feuilles de lotus. Cette caractéristiques parfaitement maîtrisée par la plante aquatique du pays du soleil levant a pu être repris par des fabricants de matières textile requiérant une imperméabilité à l'eau efficace et durable; ce à quoi les qualités hydrophobe de la feuille de lotus répondent parfaitement. Cette dernière est en fait composée de minuscules structures hyperhydrophobes et recouverte d'une cire qui, elle aussi, repousse l'eau. De fait, lorsque une goutte de pluie tombe sur la feuille, elle est directement redirigée vers le centre de celle-ci. Elle a donc inspiré des architectes qui souhaite reproduire la forme et les propriétés du lotus pour des toits de maisons éco-responsables, elles profiteraient ainsi de leur imperméabilité pour accumuler de l'eau de pluie au centre du toit afin de la réutiliser pour la douche ou pour un emploi ménager par exemple. Enfin cette plante à initié l'apparition de surface auto-nettoyante.
Bien que le potentiel d'innovation que l'on peut tirer de ce végétal aquatique soit impressionant, il n'est rien comparé à celui que l'on peut exploiter de ce qui est considéré comme le Graal du biomimétisme: la toile d'araignée. Ce fil plus fin encore qu'un cheveu semble être caractérisé par sa finesse sa légèreté et par sa fragilité. Pourtant si il y a bien une leçon que nous a appris la nature c'est bien celle de ne pas se fier aux apparences. De fait ce minuscule «câble arachnéen» bien qu'à première vue et à notre échelle il soit éphémère et précaire, il est pourtant l'un des matériau les plus solide du règne animal, il est en effet, à diamètre égal, 5 fois plus résistant que l'acier tout en conservant une excellente élasticité (le fil peut s'allonger en moyenne de 40%) de même qu'une incomparable légèreté. Ainsi les qualités inouïes de la toile d'araignée ont retenu une attention toute particulière de la part des chercheurs militaires et portaient la promesse de permettre la conception et la fabrication de gilets pare-balles inégalés jusque là en terme d'efficacité et représentaient l'espoir des ingénieurs de créer une combinaison anti-balistique bien plus résistante tout en étant bien plus légère que les versions traditionnelles en kevlar.
Enfin nous ne pouvions passer à côté de la désormais célèbre wingsuit ainsi que de son pendant sous-marin connu sous le nom de seasuit (qui fait en quelque sorte écho à notre sujet). La wingsuit est une combinaison intégrale qui est caractérisée par la membrane textile reliant les bras et les jambes du pratiquant cette dernière lui permet ainsi de «planer»; le sauteur en wingsuit effectue de cette manière une chute libre à plusieurs centaine de km/h sur plusieurs kilomètres. Cette combinaison est directement inspirée de l'anatomie de l'écureuil volant, c'est à dire de sa membrane et de sa particularité de planer d'arbre en arbre. La wingsuit et la démocratisation de cette discipline à travers le monde a alors marqué la concrétisation d'un rêve ancestral de l'Homme et fait devenir réalité le mythe d'Icare qui, à vouloir imiter la nature sans précaution, s'est au final brûlé les ailes et a donc permis à notre espèce d'accéder à ce désir intemporel qu'est celui de planer et de ressentir les sensations de vol. Et c'est en suite logique qu'est apparue la seasuit; cette invention de l'ingénieur monégasque «Pierre Frolla» est, quant à elle, inspirée de la raie et de sa morphologie plus ou moins plane. Elle a été conçue dans le but de «planer» sans effort sous l'eau et dans l'optique de pouvoir s'approcher de la faune sous-marine plus facilement sans l'effrayer (les poissons pensent en effet avoir affaire à une simple raie inoffensive). Cette combinaison à la forme particulière faite en néoprène permet de moins flotter tout assurant une glisse dans l'eau optimale.
Tout ces exemples soulignent ainsi l'omniprésence des inventions dût au biomimétisme dans notre société et marque de ce fait leurs incroyables capacités à révolutionner nos techniques, nos connaissances, et notre manière de vivre en général tout en respectant la nature et en considérant avec humilité ce qu'elle a à nous offrir. Ces nombreuses inventions nous permettent alors de nous projeter vers un futur où la biosphère aurait apporté un stable équilibre à notre civilisation et où l'Homme et la Nature vivraient en parfaite symbiose. Voilà l'esprit du Biomimétisme.













